Lettre à mon correspondant inconnu

Je t’attends, mon correspondant qui ne sait pas encore que tu es mon correspondant. Je t’attends sur le pas de la porte, le stylo au cœur. Mes mots t’attendent, tendres parfois, vrais toujours.

Je sais que tu m’attends aussi. Peut-être m’escomptes-tu, sans savoir que c’est moi que tu attends.

Je te trouverai, je sais. Un jour, pas si loin sûrement, je te découvrirai. Ou bien, c’est toi qui me trouveras. Alors, je te dirai les mots qui se bousculent dans ma plume. Je te dirai que c’est l’été ici tout le temps, qu’il fait beau, qu’il fait soleil, et que, lové dans le bleu qui baigne le ciel, tu étais le bout de rêve qui manquait à ma réalité.

Je te dirai que j’aime la vie que je vis ici, que j’aime les gens, les femmes, les hommes, que j’aime lire beaucoup, écrire aussi, que je fais mille et une choses pendant mes journées, que j’aimerais avoir plus de temps pour moi, appuyer sur la touche « ralentir » du clavier de mon existence, mais que ce n’est juste pas possible, du moins, pour l’instant. J’espère, oui, que c’est juste passager, ce déluge d’urgences qui allument constamment un bouton rouge dans mon cerveau. Cela, je te le confierai. Je te conterai aussi mes rêves les plus fous. Tu vas sourire, mon correspondant inconnu, quand tu sauras que je fantasme d’apprendre la sculpture, pour créer des structures artistiques géantes. T’imagines, moi, ta correspondante, sculpter ton visage en une énorme création de bois ou de d’acier tutoyant le firmament ? Tu vois cela, de là où tu es ? Ton visage, fluide comme le Mono, plus haut que l’Atacora, par mes œuvres, tu visualises ?

Et tu vas franchement pouffer, quand tu sauras que je rêve de créer une ligne de parfum, de fabriquer des senteurs, moi qui ne suis même pas un nez. Je suis folle des parfums, tu sais ? Des belles senteurs, des belles couleurs… Mais qu’écris-je, les couleurs sont toujours belles, pas vrai ?

Je crois plutôt que je t’écrirai donc que je suis folle des couleurs, toutes, sans exception aucune, elles sont toutes magnifiques, les couleurs…

Tu sais, en ce moment, il pleut dehors. C’est la saison. Il fait frais… Mais la fraîcheur est relative. Il fait 27°, j’ai déjà froid (l’été toute l’année, tu te souviens ?). Les nuits, je me couvre dans mon lit, et je n’allume pas mon ventilateur. Informe-moi, quel temps fait-il chez toi ? Tu me le diras, n’est-ce pas, quand je te trouverai ?

Quand je me rendrai à la poste quérir tes lettres, et les ouvrirai à l’ancienne, heureuse par avance de découvrir ton écriture, les courbes de tes « a », l’angle des traits de tes « p », la grâce et la danse silencieuse de tes mots sur la page que je devine beige. Mais elle sera bleue peut-être, ou rose. Non, soyons fous : noire ! Ténébreuse de noblesse et d’élégance, toute noire.

Tu es forcément une femme, ou un homme, je sais que tu es humain avant tout. Et c’est cette humanité en toi que j’attends, fébrile mais calme. Je t’attends, mon correspondant. De mots fermes.

Viendras-tu ?

Texte écrit en instantané le samedi 02 juillet 2022 dans le cadre de l’atelier d’écriture « Mots de femmes » de Caroline Despont.

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8 réflexions sur “Lettre à mon correspondant inconnu

  1. J’aime beaucoup les images que suggère ce texte d’une profondeur exquise, d’une légèreté agréable et d’une grande sensibilité. Caroline se laisse lire aisément et entraîne dans son univers chaque lecteur épris de belles lettres.

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  2. Ce texte est comme un rêve rempli de tendresse et d’amour. Un ami lointain que l’on pour jouer et se dire des mots que seuls les enfants savent inventer avec toute l’innocence qui les caractérise.
    Une sensibilité à fleur de peau qu’on aimerait caresser jusqu’à la fin de tous les temps.
    Magnifique.

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